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Interview d’un jeune viticulteur du Roussillon
Parce que la commercialisation du vin ne fait pas sans vin, et donc, sans raison, nous avons rencontré un jeune viticulteur des Pyrénées-Orientales, afin d’en apprendre un peu plus sur ce métier, parfois mal connu.
Afin que nos lecteurs en sache un peu plus sur toi, pourrais-tu te présenter s’il te plaît ?
Je suis Pierrick Ruiz, viticulteur à Fourques, dans le Roussillon, sur le terroir des Aspres. Membre de la coopérative « les Vignobles de Constance et du Terrassous », je me suis installé officiellement en mai 2018, bien que j’exploite depuis décembre 2017.
As-tu rencontré des difficultés particulières lors ou depuis ton installation ?
J’ai suivi une formation de responsable d’exploitation agricole au centre de formation de Rivesaltes, ce qui m’a pas mal aidé pour la partie administrative. Cela m’a permis de ne pas partir trop démuni face à la quantité littéralement astronomique de documents demandés pour mon installation. Le calendrier de la vigne et celui de l’administration ne sont que rarement correctement superposés mais maintenant que tout ceci est réglé, je me lève tous les matins sans avoir l’impression d’aller travailler. 2018 a été une très belle année, et pour le moment, tout en touchant du bois, je n’ai pas eu d’autres difficultés.
Et qu’est-ce qui t’a donné l’envie de t’installer ?
Il y a plusieurs raisons. La première, c’est l’envie d’être « mon propre patron ». La cave coopérative à laquelle j’appartiens nous donne des objectifs de qualité, il y a des contraintes de calendrier en période de vendanges afin que les adhérents apportent leurs raisins au meilleur moment, mais cela mis à part, je gère mon exploitation de manière indépendante. Mon activité me permet également de gérer mon temps comme j’en ai envie. Il y a certes des contraintes saisonnières et météorologiques, mais globalement, je suis assez flexible. Enfin, j’aime travailler à l’air libre. C’est un métier intéressant dans lequel je m’épanouis.
Pourquoi as-tu choisi de t’installer en cave coopérative ?
D’abord parce que mon père y était, je connaissais donc déjà bien le système coopératif. Cela m’a permis également de pouvoir communiquer avec les autres adhérents, qui sont mes collègues et non mes concurrents, ce qui m’a permis de bénéficier de conseils précieux la première année. Je me suis installé en coopérative également parce que l’investissement initial pour une cave particulière était trop élevé. Enfin, je ne souhaitais pas m’occuper du commerce. J’aime participer aux événements qu’organise la cave, et rencontrer la clientèle, mais concernant la commercialisation, à chacun son métier.
Quels sont selon toi les inconvénients de la coopérative ?
La première c’est le nombre d’adhérents. Nous sommes 70 et même si en général, il y a une bonne cohésion de groupe, nous ne sommes pas toujours d’accord sur tous les sujets et il faut composer entre nous. Même si ma coopérative produit plutôt du haut de gamme, et que la vente de bouteille représente environ 40% de notre chiffre d’affaires, nous sommes soumis aux fluctuations des cours mondiaux du vin. Pour le moment, tous les voyants sont au verts. Mais si on remonte 10 ans en arrière, ce n’était clairement pas le cas. Enfin, la coopération souffre d’une image désastreuse. Nous sommes considérés comme des agriculteurs irresponsables, inconscients des enjeux climatiques et aux pratiques désuètes. Au contraire, la vigne est notre quotidien et mettre en commun nos moyens de production nous permet de pouvoir nous concentrer sur celle-ci et sur nos pratiques culturales. Nous sommes suivis par un groupe écophyto pour diminuer notre impact environnemental et améliorer la qualité de notre production.
Comment vois-tu l’évolution de la viticulture au regard du changement climatique ?
L’irrigation ou la mort [rire]. Mon père est installé depuis 30 ans et le changement climatique n’est pas une blague. Les saisons ne sont plus marquées, les épisodes extrêmes fréquents, et les sécheresses à répétition rendent la culture de la vigne de plus en plus compliqué. J’ai fait un voyage en Grèce sur le thème des techniques viticoles pour résister à la sécheresse, ils avaient trouvé le truc : un forage non déclaré par parcelle.
Article écrit par : Manon Lorenzetto
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