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La seconde main… Nouvel argument marketing de l’industrie du textile
Confronté à des difficultés depuis la crise sanitaire, de plus en plus d’enseignes font le pari de la seconde main. Lancé depuis quelques années par des marques de milieu de gamme, comme La Redoute ou Etam, c’est désormais au tour des grands acteurs de la fast fashion et du luxe de s’étendre sur ce marché.
Le marché de la seconde main en plein essor
De nos jours, de nombreuses marques proposent d’acheter ou de revendre des articles de seconde main à travers leurs propres plateformes. Que ce soit en friperies, plateformes en ligne spécialisées ou encore « corners » dans les grandes surfaces, la seconde main est présente partout. En effet, face à une demande en constante augmentation, les marques multiplient ces canaux de vente afin de suivre toutes les tendances du marché. Certaines enseignes comme Le Printemps ou Auchan, se sont lancées sur des stands directement présents dans leurs boutiques, tandis que d’autres ont développé leurs propres plateformes en lignes. ces dernières s’inscrivent dans une démarche de concurrence directe avec les grands acteurs du secteur, comme Vinted ou Thredup.
Depuis quelques mois, les annonces s’ajoutent autour de cette tendance, tant de la part du luxe que de la fast-fashion. Deux géants de la mode rapide, fréquemment critiqués pour leurs méthodes de fabrication, se sont lancés à l’automne 2022 dans cette nouvelle façon de consommer, avec leurs sites de seconde main. Également, en octobre dernier, le leader de l’ultra fast-fashion Shein a dévoilé « Exchange », une offre qui s’adresse pour l’instant au marché des Etats-Unis. Dans les semaines qui ont suivies, c’est Zara qui a créé la stupeur avec Pre-owned », une plateforme actuellement au stade de développement au Royaume-Uni.
S’ajuster aux revendications des consommateurs
Il est à noter que la marque Zara est la plus représentée sur les plateformes dites “classiques” d’occasion, comme Depop ou Vestiaire Collective, avec plus de 670 000 annonces selon une étude conduite en 2022 par le site Savoo. L’entreprise a donc fait d’une pierre deux coups en étendant son offre tout en exprimant un “engagement à évoluer vers un modèle d’économie circulaire”. Autre signal fort, du côté des griffes de luxe cette fois-ci, il est possible de découvrir Re-sell, un programme de revente proposé par Balenciaga qui permet de céder ses vêtements issus des collections passées en échange d’un bon d’achat.
Ces initiatives semblent donc s’orienter dans le bon sens, pourtant elles ne persuadent pas les spécialistes du secteur. En effet, Audrey Millet, docteur en histoire, chercheuse à l’université d’Oslo et autrice du Livre noir de la mode explique « Les marques ont l’habitude depuis le 19e siècle d’écouter les revendications populaires ». Plébiscitée pour son rôle anti-gaspillage et l’avantage financier qu’elle confère, la seconde main répond à deux enjeux phares pour le consommateur, et les grandes entreprises l’ont bien comprises comme rajoute la chercheuse, n’hésitant pas à qualifier ces démarches de « greenwashing ».
Une perspective importante et bénéfique face à la crise
La seconde main est alors considérée comme un argument marketing, venant remettre en question ses bénéfices, d’autant plus que le modèle des portails de revente est souvent accusé de d’inciter à l’hyper-consommation. Ainsi, à travers cette démarche, les consommateurs se déculpabilisent d’acheter des produits neufs, se rassurant de pouvoir les revendre par la suite. En s’affranchissant de ce marché, les grandes enseignes enclenchent une grimpée des tarifs de la seconde main, revendant de vieux articles pratiquement au prix du neuf.
D’après les chiffres de l’Alliance du Commerce, les ventes de textile en ligne ont subi une baisse de plus de 18% au premier semestre 2022 comparé à l’année 2021, tandis que les commerces physiques ont rencontré 11% de fermeture en l’espace de deux ans. Parallèlement, la seconde main a triplé depuis 2020 et devrait connaître une croissance de 20 à 30% par an, selon une étude du cabinet Boston consulting Group.
Ce secteur semble donc décrire une nouvelle façon de consommer, en lien avec les enjeux environnementaux actuels. Pourtant, certains effets vont à l’encontre de cette démarche écologique, comme l’effet de rebond avec le concept de « je fais des économies, donc je peux me permettre de consommer plus ». Ainsi, plusieurs questions viennent se poser autour de la façon de consommer la seconde main et des effets insidieux qu’elle peut provoquer.
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